Ecrire un texte dans lequel il fallait glisser : « Cela aurait dû être le plus beau jour de ma vie ! »
Merci Thaïs !
« Cela aurait dû être le plus beau jour de ma vie ! » Voilà ce que pensait Adam, perché sur une haute branche, alors qu’un être repoussant tentait d’escalader le pommier chargé de fruits alléchants à l’assaut de son corps et de sa virginité.
Quelques jours auparavant, il avait prié de toutes ses forces, avait psalmodié sans relâche « Mon Père qui êtes aux cieux », pour qu’enfin le Tout-Puissant lui crée un compagnon de route, de jeux de l’amour et du hasard. L’Autre là-haut devait être sourd, ou feindre de l’être, il lanterna avant d’octroyer au premier des mortels un complice répondant à son cahier des charges. Finalement, il consentit à quitter l’Olympe, abandonnant provisoirement ses congénères divins, s’engouffra dans le premier interciel qui passait et descendit à l’arrêt du pommier où, régulièrement, il venait disserter avec son adversaire et néanmoins ami, le serpent.
Après quelques secondes d’éternité, Adam vint le rejoindre dans le plus simple appareil, faute d’avoir pu dénicher sur les ceps récemment plantés une feuille de taille adéquate. Il voulut l’embrasser, mais Dieu prétexta pour ne pas le biser que l’étiquette s’opposait tout à fait à pareilles familiarités. A dire vrai, son appareil reproducteur flambant neuf rebutait un peu le Créateur, qui préféra du coup le tenir à distance. Si d’aucuns se mélangeaient parmi les Olympiens, le Très-Haut préférait pour sa part culbuter seul, sa Diane chasseresse.
Adam expliqua à Dieu qu’il s’ennuyait ferme, et désirait ardemment un nouveau compagnon. Magnanime, le Grand Architecte voulut bien envisager la requête, mais fit valoir que tout ne pourrait se dérouler simplement par la seule opération du Saint-Esprit. Sans anesthésie préalable, Dieu lui arracha une côte après quelques palabres.
L’os court se sublima en un être peu ou prou de la même taille qu’Adam, mais un dimorphisme flagrant apparut cependant, qui traumatisa dans l’instant le pauvre convalescent. Un ballot de paille trônait sur la tête de la chose, s’en échappaient des brins venant griffer de trop frêles épaules. Les tétons pointaient sur d’immondes boursouflures, et pire encore, rien ne pendait entre les jambes ! Adam se retourna vers le barbu divin et l’implora de revoir sa copie. Il désirait un double, pas un brouillon ! Adam rêvait de jeux d’amour et de plaisir, pas de coït contre nature ! Quelle horreur lui proposait-on ?!
Il sentit une main se poser soudain sur son épaule, l’être difforme lui souriait. Il décela dans son regard mouillé un éclat de lubricité, qu’il eût préféré retrouver dans la luisance d’un œil testiculé.
Pris d’une terrible panique, il réunit suffisamment de ressources pour s’élancer à l’assaut des cimes du pommier, s’y réfugia sur l’une des plus hautes branches. Le plus horrible jour de sa vie, sans aucun doute possible ! Privé de toute échappatoire, il hurla son effroi, tirant de sa torpeur le serpent qui sommeillait là. Pour calmer l’hystérique, et pouvoir à nouveau se plonger dans une léthargie salvatrice, la saucisse à sang froid – comme aimait à l’appeler le Tout-Puissant – vint susurrer à l’oreille d’Adam quelques mots apaisants : « Croque la pomme avec Eve une seule fois, et tu en seras à tout jamais débarrassé. J’intercèderai auprès de Dieu pour qu’il crée ta parfaite réplique cette fois, ainsi pourrez-vous vous ramoner le fond de la grotte. » Adam, terriblement choqué d’un tel langage mais acculé et prêt à tout, crut dans le bien-fondé des propos du reptile.
Il sauta par terre et Eve par la force des choses, quand son petit Jésus dérapa vers les tréfonds de la grotte de Massabielle. Le piège tendu par le serpent fonctionna. Un spermatozoïde féconda l’ovule, privant l’homosexualité de tout espoir de primauté, mais assurant à l’humanité une chance de pérennité.